Enseignements sur la manière dont le leadership, les pratiques exemplaires et la culture contribuent de manière déterminante à prévenir les maladies d’origine alimentaire.
Par Randy Huffman, directeur en chef, Salubrité alimentaire et durabilité
Le 21 octobre dernier, les Aliments Maple Leaf a tenu la 15e édition annuelle de son Symposium sur la salubrité alimentaire, qui a réuni divers dirigeants de la chaîne d’approvisionnement des produits de consommation emballés. Le thème de cette année était « Combien d’alertes faudra-t-il encore?. Faire face à la menace Listeria – Reprendre le contrôle avant la prochaine crise ».À mes yeux, il ne s’agissait pas d’un simple événement sectoriel, mais bien d’un appel à l’action qui a mis en lumière l’importance de faire preuve d’un solide leadership en matière de stratégies de salubrité alimentaire. J’ai eu le plaisir d’animer les événements de la journée avec mon collègue Spir Marinakis, vice-président, Salubrité alimentaire et Assurance de la qualité, en tant que coanimateur et maître de cérémonie.
En repensant aux discussions qui ont émaillé la journée, je songe notamment à l’allocution d’ouverture très inspirante prononcée par Michael McCain, président-directeur du conseil d’administration des Aliments Maple Leaf. Michael a affirmé que la salubrité alimentaire n’est pas qu’une affaire de science et de contrôle des processus. C’est avant tout une affaire de culture, de leadership, et de détermination constante à agir de façon professionnelle – même quand c’est difficile.
À la suite des épidémies de listériose survenues à la fois au Canada et aux États-Unis, l’industrie alimentaire canadienne ne peut se permettre de baisser la garde. La salubrité alimentaire doit être un souci quotidien. La volonté de faire preuve de leadership et d’un réel réel sens des responsabilités ainsi que de favoriser la transparence doit être au cœur de chaque programme de salubrité alimentaire.
Qu’est-ce que Listeria monocytogenes?
Listeria monocytogenes est une bactérie qui peut contaminer les aliments et provoquer la listériose, une maladie grave. Contrairement à la plupart des bactéries, Listeria se développe dans les milieux froids, comme les environnements de transformation à froid ou les réfrigérateurs des consommateurs, ce qui rend les aliments prêts à consommer particulièrement vulnérables. Pour les experts en salubrité alimentaire, Listeria est un pathogène persistant qui nécessite un échantillonnage environnemental énergique et des contrôles stricts. Pour le public, Listeria constitue une menace importante, car, même faiblement présente, elle peut présenter un danger – en particulier pour les femmes enceintes et les personnes âgées ou au système immunitaire affaibli. Les symptômes vont de légers (fièvre, maux d’estomac) à graves (infections potentiellement mortelles). Listeria engendre l’un des taux de mortalité humaine les plus élevés associés aux agents pathogènes présents dans les aliments. La prévention de la contamination par Listeria exige de solides systèmes techniques ainsi qu’une culture de la vigilance et de la responsabilité en matière de production alimentaire.
La crise de la listériose vécue par les Aliments Maple Leaf en 2008
En août 2008, les Aliments Maple Leaf a vécu l’événement le plus tragique de son histoire plus que centenaire. Les produits de charcuterie tranchés de Maple Leaf se sont en effet révélés contaminés par la bactérie Listeria monocytogenes. La source de cette contamination a été localisée dans l’une de nos usines de Toronto. La tragédie qui s’en est suivie a coûté la vie à 23 personnes.
C’est à l’occasion de cette tragédie que j’ai découvert la culture des Aliments Maple Leaf. J’ai admiré le dévouement de Michael McCain, alors chef de la direction, qui a assumé l’entière responsabilité de la contamination et du plan d’action mis en œuvre pour aller de l’avant.
Depuis cette tragédie, qui remonte à 17 ans, nous sous sommes engagés à devenir un chef de file en matière de salubrité alimentaire, pour le bien des Canadiens. Ce n’est pas un hasard si notre Symposium sur la salubrité alimentaire en est cette année à sa 15e édition. Voici quelques-unes des leçons et des pistes de réflexion sur lesquelles nous nous sommes penchés dans le cadre du symposium de cette année.
Une culture axée sur un nouveau leadership et un engagement durable
Le premier groupe de discussion de la journée, que j’ai eu le plaisir d’animer, a réuni divers dirigeants des Aliments Maple Leaf parmi lesquels Adam Grogan, président et chef de l’exploitation, et Mike Yang, dirigeant principal, Chaîne d’approvisionnement. Il avait pour thème la combinaison d’un leadership et d’une expertise technique.
Mike, qui s’est joint aux Aliments Maple Leaf plus tôt cette année, a livré un point de vue personnel fondé sur sa visite de notre usine de Hamilton, en Ontario : « Ce sont les comportements des membres de l’équipe en matière de salubrité alimentaire qui m’ont d’abord frappé. L’usine a été conçue pour assurer la salubrité alimentaire, non dans un souci de praticité ou pour écouler davantage de produits. La salubrité alimentaire y est une vraie préoccupation. Les centaines de membres de l’équipe que j’ai observés ce jour-là se soucient de toute évidence énormément de la salubrité alimentaire. Leurs pratiques, notamment en matière de lavage des mains, en témoignent. Cette usine a été avant tout conçue dans une optique de prévention. »
Pour Adam, un dirigeant doit savoir créer un lieu où chaque personne peut partager son point de vue. Les Aliments Maple Leaf ont à leur actif près d’une quarantaine de marques. Selon Adam, « nous nous devons de protéger les gens qui consomment nos produits ».
Excellence technique et maturité culturelle
Prononcé par moi-même et par Lone Jespersen, fondateur de Cultivate SA, le discours principal qui a émaillé le symposium a mis l’accent sur le contrôle inégalé, mais complexe, de la Listeria assuré par les Aliments Maple Leaf. « Nous comptions des dizaines d’années d’expérience en matière de compréhension de ce pathogène. Il aime se développer dans les milieux réfrigérés, où il prospère. Nous savons que Listeria échappe aisément aux radars et peut survivre en l’absence de contrôle. C’est pourquoi il est essentiel que les membres de l’équipe fassent preuve de persévérance dans la gestion des risques. Ils doivent pour cela disposer des outils techniques appropriés, en plus d’adhérer à la culture imposée. »
L’une des leçons les importantes que nous avons tirées sur le plan technique réside dans la nécessité de procéder à un échantillonnage environnemental énergique ainsi que de respecter le protocole de détection et de destruction. « Il est essentiel de procéder à un échantillonnage environnemental énergique des zones en contact avec les aliments, mais aussi de celles qui ne sont pas en contact avec les aliments. Il est également essentiel de respecter le protocole de détection et de destruction en présence du moindre résultat positif. Les équipes chargées de la détection et de la destruction doivent être interfonctionnelles et tournées vers l’action. Elles doivent élaborer de multiples hypothèses, les tester jusqu’à parvenir à des conclusions, ainsi que rechercher la cause première de tout résultat positif. Il est essentiel de tirer les leçons des événements passés. » Lone a souligné l’importance des quatre éléments suivants pour améliorer notre culture de la salubrité alimentaire : l’exercice d’un leadership, la stabilité de celui-ci, une réelle importance attachée à la santé des membres de l’équipe et un souci particulier de a santé des membres de l’équipe de première ligne. En présence de ces quatre éléments, les membres de l’équipe sont davantage enclins à se mobiliser et à adopter les bons comportements en matière de salubrité alimentaire.
Commentaires de dirigeants
Nicole Johnson-Hoffman, chef de l’exploitation au Meat Institute, a animé une table ronde réunissant d’autres chefs de l’exploitation d’entreprises alimentaires parmi lesquels Jim Snee, anciennement de Hormel Foods, David Van Eekeren, de Land O’Frost, et Dennis Vignieri, de Birchwood Foods.
Aujourd’hui à la retraite, Dennis a expliqué qu’il y avait eu pour lui un « avant » et un « après » – cela l’a frappé au fil de ses nombreuses années en tant que président et chef de la direction. « Quand j’occupais ce poste, on me demandait toujours ce qui m’empêchait de dormir la nuit. Je répondais sans hésiter : le souci de la salubrité alimentaire, de la sécurité des personnes et du bien-être animal. Un jour, je m’en souviens très bien, un investisseur m’a demandé de lui en dire plus, de préciser ce que je faisais à ce propos. C’est le genre de moment qu’on n’oublie pas. »
David s’est fait l’écho des sentiments exprimés plus tôt dans la journée par Adam : « Une marque est un pacte avec le consommateur. ». Nous devons donc en toutes circonstances proposer aux consommateurs un produit constant, de grande qualité et sûr. Selon David, « les consommateurs doivent avoir confiance en nos produits, savoir que leur consommation ne présente aucun risque. » J’ai été particulièrement impressionné quand David a précisé que chaque emballage de produits alimentaires Land O’Frost porte sa signature au dos – c’est une question de responsabilité!
Dennis a ajouté une chose avec laquelle, je crois, bien des gens seraient d’accord : « La salubrité et la qualité des aliments sont des enjeux de taille. Nous devons y veiller jour après jour. »
Nicole a précisé qu’il est important de continuer à faire confiance aux experts, mais en restant vigilants. « Il faut bien sûr faire confiance aux experts. Mais, en matière de salubrité alimentaire, la confiance a ses limites. Il faut vérifier les dires des experts. Il faut les interroger. Et veiller à obtenir un second avis. Il faut aussi faire appel à d’autres ressources susceptibles de mener à des enseignements insoupçonnés. »
J’ai été exceptionnellement ému par l’un des derniers propos de Nicole : « Aucun dirigeant de l’industrie de la viande ne doit tirer de leçons en matière de salubrité alimentaire au détriment de la vie d’un enfant. »
Revenir aux fondamentaux de la salubrité alimentaire
Le symposium a été marqué par une excellente présentation proposée conjointement par Matt Thomas, directeur principal, Salubrité alimentaire et assurance de la qualité, Service alimentaire et Volailles au détail à valeur ajoutée, chez Tyson Foods, et Steve Tsuyuki, mon ancien collègue au sein des Aliments Maple Leaf, désormais conseiller en matière de surveillance environnementale et d’entretien sanitaire chez Tsuyuki and Sanitation, Ltd.
Matt et Steve ont rappelé que les prélèvements énergiques réalisés dans le cadre des tests de salubrité alimentaire ne visent pas qu’à assurer la conformité. Ils sont effectués délibérément pour vérifier l’efficacité des contrôles. « Si Listeria est présente dans l’environnement, il est impératif de la repérer. Les sites de prélèvement déploient des mesures de contrôle pour maîtriser chaque élément de l’équation », a expliqué Matt. Je recommande également de procéder à un prélèvement au niveau de chaque drain parce que, dans bien des cas, le site générateur d’un résultat positif n’est pas à l’origine de la contamination. Lorsqu’on obtient un résultat positif, l’enquête doit s’étendre au-delà de ce site – à chaque fois. »
Steve a souligné l’importance d’une culture de la salubrité alimentaire passionnée et dynamique. Conformément aux valeurs et aux engagements de l’entreprise, sa culture en matière de salubrité alimentaire repose avant tout sur la recherche des causes de chaque contamination. La parfaite compréhension de cette culture réduit la dépendance à l’égard des systèmes et évite d’avoir à expliquer aux gens ce qu’ils doivent faire.
Les consignes données font en sorte que ces valeurs se traduisent par des convictions et des comportements. Et les mesures déployées font en sorte que ces convictions et comportements se traduisent par la mise en œuvre de politiques, de processus et de procédures. Résultat? Une culture qui s’appuie sur une série de processus et de procédures opérationnelles standards conformes aux engagements de l’entreprise. Les gens font ce que l’on attend d’eux.
Cela résume bien pourquoi il est nécessaire de déployer une stratégie équilibrée garante d’efficacité et de durabilité.
Dernières réflexions : un fardeau que nous devons assumer sans relâche
La journée s’est terminée par une étude de cas sur le leadership en matière de salubrité alimentaire, présentée par Paul Klassen, vice-président, Salubrité alimentaire et Qualité, chez Treehouse Foods. Il y a près d’un an, Treehouse a procédé au Canada et aux États-Unis à un important rappel de gaufres congelées de marque pour cause de Listeria. Paul a décrit l’événement honnêtement et sans détours : exactement ce dont nous avions besoin pour clôturer cette formidable journée marquée par de franches discussions consacrées à un problème qui touche tous les fabricants de produits alimentaires de notre réseau.
Quand je repense au symposium de cette année, ces mots de Nicole me reviennent : « La salubrité alimentaire est un fardeau que nous devons assumer sans relâche. Il faut sans cesse s’attaquer aux problèmes de salubrité alimentaire, sans avoir la prétention de les éradiquer définitivement. »
La salubrité des aliments fait partie de l’ADN de la culture des Aliments Maple Leaf. Nous avons tiré du passé des leçons incroyablement pénibles dont nous tenons compte dans tout ce que nous faisons, aussi bien dans le cadre de la conception de nos usines que de la formation des membres de l’équipe portant sur la salubrité alimentaire. Il est essentiel que nous n’oubliions jamais les terribles pertes que peuvent engendrer les crises en matière de salubrité alimentaire, sans faire preuve de complaisance et en cherchant sans cesse à innover ainsi qu’à trouver de nouvelles façons de tirer des leçons pour assurer la sécurité des membres de l’équipe et de nos clients.
L’industrie alimentaire canadienne doit continuer à faire face à la menace Listeria avec vigilance et humilité, en adoptant la culture qui s’impose et en faisant preuve de leadership. Nos marques constituent un pacte avec les consommateurs. Chaque jour est une occasion de gagner et de conserver la confiance de ceux-ci.